Vivre ses différences, handicapé ou non !
Ce modeste papier pour coucher quelques mots sur les différences de chacun, les différences humaines.
Prendre conscience que nos différences sont nos forces !
La différence c’est quoi ? Une comparaison, se distinguer d’un autre…
La différence de l’autre, n’est-ce pas le respecter ?
N’est-ce pas se respecter que d’honorer les inégalités ? Qui peuvent autant nous rassembler que nous éloigner.
S’éloigner par méconnaissance, par crainte, par l’image que les différences nous renvoient. Penser que le handicap est visible ! Mais que faites vous donc de ce qui ne se voit pas ?
Derrière la différence que vous jugez, se cache une personne humaine.
Chacun son histoire, chacun ses fragilités, handicapé ou non !
On naît, on meurt, on est, et parfois on en pleure. On pleure parce que l’on souffre. L’on souffre d’être mis de côté. Rejeté parce que l’on est différent, fragile.
Quelles sont les personnes non handicapées qui n’ont jamais ressenti cet état ?
Se mettre donc à la place de l’autre…. Mettre nos peurs de côté, analyser les fragilités de tout un chacun.
Osez, car elles osent venir vers vous, ne fuyez pas comme des lâches, osez créer la rencontre. Ne vous sentez pas gêné de ne savoir quoi dire ou quoi faire, prenez le risque, même d’une maladresse, qui fera tomber cette indifférence, cette différence.
Bientôt 6 ans que je travaille à faire de mon métier l’excellence dans le handicap, et je parlerais donc de cette différence.
Les résultats sont là, ils parlent.
Je les entends de loin, et les observe de mon regard opalin. Car oui, ils me touchent au plus profond de mon être. Et moi aussi je me sens exclu. Exclus du regard de certains professionnels.
Tu ne rentres pas dans le moule, tu as été, tu n’es plus…
Tu perçois les craintes dans la voix des personnes à qui tu parles de ton travail.
Ces personnes qui ne daignent même pas venir observer ou prendre part et prendre conscience de la capacité de travail de ces personnes différentes. Vous les croyez différentes ! Elles le sont, tout comme vous l’êtes. A la différence, qu’elles osent venir vers vous.
Vous avez passé l’adolescence, faites de votre maturité une force. Osez !
Voilà ce n’est qu’un coup de « gueule » pour une poignée, où devrais-je dire une catégorie de personnes.
Heureusement que notre profession reste assez ouverte sur le handicap mais plus physique que cognitif, il faut bien l’avouer.
Accepter le handicap n’est pas chose facile, et dans les deux sens, que l’on soit ou non handicapé.
Cette différence particulière n’est certes pas facile dans notre profession. Il faut savoir changer ses codes, s’adapter à chaque personne en situation de handicap.
Savoir se remettre en question continuellement. Accepter de devoir changer toute une organisation en une fraction de seconde, accepter de devoir bouleverser un service, et au combien c’est dur physiquement et moralement, mais l’on se transpose vers l’autre, cette personne fragile et l’on décuple ses forces au prix parfois d’une énergie qui se vide au fil des heures. Et l’on se sent sur le fil du rasoir parce que l’on ne voit plus le handicap, on craque, et d’un coup revirement de situation, elles se reprennent et donnent le meilleur de ce qu’elles ont, avec tout le professionnalisme que je leur ai fait acquérir. Voilà, à ce moment je prends le recul nécessaire et me ravise.
Parce que j’ai une équipe avec ses difficultés mais qui donne le meilleur.
Ma grande satisfaction est de faire taire ses différences. Lorsque l’on me dit que le niveau est digne, digne de certains établissements. Que l’accueil est plus que touchant et d’un professionnalisme sans failles.
Car oui, je les pousse à l’excellence. De la prise de contact à la prise de congé.
Je leur transmets nos codes, notre exigence et notre rigueur, la passion de notre métier. L’élégance à la Française, qu’ils prônent avec une grande éminence.
Parce qu’ils ont la lucidité de savoir qu’ils doivent redoubler de plus d’effort. Voilà leur combat, redevenir le meilleur, venir me dire je veux être comme tout le monde, venir me dire merci pour ce que je leur apporte. Non merci à vous, qui malgré l’incompréhension, l’inintelligence des autres et votre souffrance, savez parfois sans vous en rendre compte frôler cette excellence. Vous êtes comme tout le monde.
Ma plus grande satisfaction et d’avoir des personnes qui se sentent professionnellement d’égal à vous et moi. Les voir arriver à la plénitude professionnelle, quelle fierté.
Même si la question d’engager une personne handicapée reste délicate, osez, osez n’intégrer qu’une seule personne dans votre équipe et portez-lui bienveillance, car elle, saura vous l’apporter.
Changez votre regard, adaptez-vous comme elle saura s’adapter à vous. Elles sont victimes de leur handicap, comme nous sommes victimes de nos préjugés, car souvent nous ne nous donnons pas la peine de creuser plus loin. Si parfois elles arrivent à dépasser ces préjugés, ne devrions-nous pas en faire autant ?
Gardez à l’esprit que nous ne sommes pas tous handicapés, que le handicap est régi par des lois, notamment celle de 2005, mais gardez à l’esprit que nous sommes tous fragile.
Gardez à l’esprit que nous avons en face une personne ordinaire, voilà la clef, la force.
Lorsque j’ai pris mes fonctions en 2012 dans l’établissement pour lequel je travaille à lors actuel, ma mission étant de former ce public et de rentabiliser le restaurant, je me suis dit « quel challenge », quel défi à relever que de pouvoir former des personnes en difficulté pour intégrer un milieu ordinaire.
Après avoir pris connaissance des divers textes et lois, et quel pavé, sur celui de l’Anesm (agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux), après avoir étudié les différentes chartes sur la personne accueillie et loi de 2005 et 2009, et là vous avez juste envie de retourner à un bon vieux livre de techno restaurant ! J’ai pris le parti sans être issu de ce monde et n’ayant à l’époque pas reçu de formation, (et là mon empathie m’a beaucoup aidé) de les considérer comme vous et moi.
Pourquoi ?
Parce que lorsque j’ai intégré l’équipe je voyais certains anciens éducateurs ou membres parler non à des adultes, mais à des enfants. J’avais une équipe de travailleurs en situation de handicap, face à un métier qu’ils ne maitrisaient pas et qui n’avaient aucune confiance en eux.
Au bout d’une semaine l’un d’eux vient me voir et me dit.
« En fait, les gens viennent ici pour voir des bêtes de cirque et nous jeter des cacahuètes, nous sommes là pour les faire rire »
Cette réflexion m’a laissé perplexe et profondément touché. Il fallait déjà que je trouve mes marques dans ce « monde »
Je suis resté 2 mois en retrait à analyser chacun de leurs faits et gestes, ce qui m’a valu sous trêve de plaisanterie de m’être fait traiter d’autiste pas un membre de la direction. Bref !
J’ai pris le parti de les considérer comme je le faisais avec mes anciennes brigades en m’adaptant simplement aux difficultés de chacun. Et voilà ma fierté aujourd’hui est de voir des personnes avec une énorme confiance et une maitrise professionnelle fabuleuse.
Certes cela est mon expérience, et bons nombres de mes confrères agissent ainsi et dans ce sens. Cultiver nos différences, vivres celles-ci dans le partage, et un échange de compréhension.
Pensez qu’accepter une personne différente en tant que personne normal, c’est justement lui faire oublier sa différence.
Le handicap n’est pas une maladie contagieuse, c’est un état.
Il est de moins en moins tabou. Mais il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Le personnel médical et paramédical est de plus en plus formé. Mais où sont les familles là-dedans, les aidants, l’entourage familial qui n’est souvent pas pris en compte et en charge, et là c’est mon expérience personnelle qui parle, et j’ai des pensées pour d’autres qui se reconnaitrons dont une fidèle amie Florence.
L’on sent la volonté d’une forte prise de conscience d’aller dans le sens de l’amélioration. Mais il reste encore beaucoup d’indélicatesses qui freinent la progression. Je me rends compte au gré de mes balades dans les lycées et les centres de formations hôtelières que nos jeunes ont une très bonne ouverture d’esprit sur le handicap. J’ai eu le bonheur d’encadrer l’année dernière une équipe de BTS du Lycée Paul AUGIER et quelle satisfaction de voir leurs yeux pétiller et leur intéressement au handicap. Les questions posées auxquelles j’ai pu répondre ont été très pertinentes.
Moi je continue d’analyser ce monde, le monde !
Je ne me mets plus à la place de personnes en situation de handicap, mais à la place de tout le monde. Car nous avons tous nos forces, nos faiblesses. Prenez conscience que vous aussi êtes jugé. Prenez conscience que souvent l’on ne sait pas utiliser votre force, mais vos faiblesses pour mieux vous atteindre.
Je terminerais par un cours extrait de Platon que j’aime bien.
« Fais preuve de gentillesse envers tous ceux que tu rencontres, leur combat est peut-être plus dur que le tien. »
Eddy BONJEAN